Biographie : | Ni Tanjung (vers 1930 - 2020) est née à Saren Kauh, Budakeling, un village de la partie orientale de Bali, en Indonésie. Issue d’une famille de paysans, elle n’est pas scolarisée et ne sait ni lire ni écrire. Adolescente, alors que l’île est occupée par l’armée japonaise, elle est contrainte aux travaux forcés durant quatre ans. Elle se marie vers 1950 et donne naissance à quatre enfants, dont trois meurent prématurément.
Peu de temps après le décès de son fils cadet, elle commence à manifester un comportement extravagant, en totale opposition à l’attitude traditionnellement retenue des Balinais. D’autres événements traumatisants l’affectent profondément et aggravent sa fragilité psychique. Au milieu des années 1990, elle part vivre avec son mari dans une petite chaumière située dans la cocoteraie d’un village. C’est là que début sa vie artistique, alors qu’elle a environ soixante-dix ans.
Dans la pièce sans fenêtre qui lui sert d’habitation, Ni Tanjung réalise des figures colorées qu’elle dessine puis découpe avec soin. Exécutés à la craie grasse sur du papier, certains visages dessinés sont réunis en assemblages arborescents, à la manière de bouquets; elle en installe d’autres en équilibre sur les fils tendus d’un mur à l’autre de sa chambre, comme des guirlandes. Ce dispositif lui permet de s’entourer d’une foule imaginaire qu’elle appréhende indirectement et à l’envers, dans le reflet d’un petit miroir. Ce procédé lui permet aussi d’inscrire le reflet de son propre visage au sein de cette mise en scène ; elle se mire alors au milieu des têtes dessinées, probablement des autoportraits ou les portraits de ses ancêtres.
Une fois veuve, Ni Tanjung est accueillie chez sa fille à Denpasar et poursuit ses créations jusqu’à son décès, à l’âge de quatre-vingt-dix ans. |